Prévention • Normes de construction
La protection parasismique est aujourd'hui une exigence formalisée par la puissance publique, qui prescrit via des textes réglementaires les objectifs à atteindre, en s'appuyant sur les normes techniques établies par les professionnels. Cela n'a pas toujours été le cas, et par exemple les premières règles françaises (AS55) n'avaient qu'un statut de normes techniques, dont l'application réelle restait un libre choix des maîtres d'ouvrage de l'époque.
Les textes actuellement en vigueur ont été globalement remis à jour au début de la décennie 2010, dans le cadre de la généralisation au niveau européen de l'usage des normes de construction communes à la Communauté Européenne (les Eurocodes). Il peut cependant être utile de connaître les textes antérieurs, puisque une partie importante du bâti existant a été construite en utilisant des référentiels plus anciens. L'AFNOR ne met à disposition que les textes des normes les plus récentes : la conservation des textes plus anciens est cependant utile, et certains d'entre eux peuvent être accessibles auprès de l'AFPS.
Un zonage sismique est l'expression d'une cartographie de l'aléa sismique et un outil réglementaire pour développer une stratégie de prévention du risque sismique. Le zonage actuel résulte du développement d'études probabilistes de l'aléa sismique au début des années 2000, les zonages précédents étant issus d'approches déterministes plus anciennes de l'aléa sismique. Du fait de ce changement de méthode scientifique, ce zonage nouveau n'identifie pas que les communes déjà connues comme très proches d'un événement sismique historique, mais aussi celles où un événement sismique analogue à ceux identifiés sur une base historique est envisageable.
Ce zonage réglementaire s'appuie sur la définition de zones géographiques réputées homogènes pour hiérarchiser des exigences proportionnées aux enjeux du territoire. Il est donc, par construction, discontinu au niveau des limites de zone, alors que l'aléa sismique est nécessairement continu à grande échelle, si l'on fait abstraction des effets de site très locaux (à l'intérieur de chaque commune). Ce choix technique est motivé par la facilité administrative qu'il procure dans la hiérarchisation des exigences et leur utilisation. Les évolutions récentes dans des pays beaucoup plus sismiques que le nôtre tendent vers des zonages continus, mais un tel choix demanderait de reformuler différemment un certain nombre de critères de hiérarchisation des enjeux.
Le zonage sismique national aujourd'hui en vigueur résulte des décrets de 2011 relatifs à la prévention du risque sismique. Le territoire français est découpé en cinq zones de sismicité croissante, de 1 à 5. Chaque zone géographique ainsi définie est associée à une valeur de référence de l'aléa sismique au rocher. Par ailleurs, chaque zone est associée à des exigences différenciées en fonction de la classe d'importance des constructions. Ainsi pour les zones les moins exposées à un aléa sismique du territoire national, la très grande majorité des ouvrages reste non soumise à des prescriptions de prévention parasismique.
On notera que des modifications à la marge de ce zonage sismique ont été effectuées depuis sa première parution, pour prendre en compte les évolutions de la nomenclature des communes, liées aux processus de regroupement de celles-ci qui ont abouti depuis.
Le territoire français est découpé en 5 zones de sismicité :
5 | Sismicité forte |
4 | Sismicité moyenne |
3 | Sismicité modérée |
2 | Sismicité faible |
1 | Sismicité très faible |
Décret 91-461 du 14 mai 1991 relatif à la prévention du risque sismique
Ce décret, modifié par le décret 2000-892 du 13 septembre 2000, introduit deux catégories d’ouvrages (bâtiments, équipements et installations), en fonction du risque encouru en cas de séisme :
- Les ouvrages « à risque normal » sont les ouvrages pour lesquels les conséquences d’un séisme demeurent circonscrites à leurs occupants et à leur voisinage immédiat
- Les ouvrages « à risque spécial » sont ceux pour lesquels les conséquences d’un séisme peuvent ne pas être circonscrits à leur voisinage immédiat, suite aux risques d’explosion, de pollution, d’incendie… susceptible de se produire.
Cette différenciation des exigences parasismiques en fonction des conséquences d'un séisme reste un des principes directeurs de la politique de prévention parasismique aujourd'hui. Les exigences réglementaires sont donc toujours déclinées suivant la nature des ouvrages concernés : bâtiments relevant du risque normal, ouvrages d'art, installations ICPE relevant du risque spécial, installations nucléaire de base, barrages.
Décret 2000-892 du 13 septembre 2000 relatif à la prévention du risque sismique
Ce décret corrige et complète le décret 91-461 du 14 mai 1991 : il introduit le rôle spécifique dévolu au Plan de Prévention des Risques dans le dispositif de prévention parasismique français, quand celui-ci conduit à définir au niveau communal un aléa sismique différent de celui qui résulterait des règles générales. Cette évaluation locale spécifique peut résulter une étude à plus petite échelle de l'aléa sismique, ou intégrer les apports d'un microzonage communal, notamment en termes d'effets de site spécifiques au territoire concerné.
Il rendait par ailleurs cohérents le décret 91-461 du 14 mai 1991 et son arrêté d’application du 19 mai 1997 pour les bâtiments, en signalant que les ouvrages concernés par l’application des règles de construction parasismiques sont les ouvrages nouveaux (seuls initialement visés par le décret 91-461) et également les ouvrages dans lesquels des travaux importants sont effectués (ces travaux étaient listés dans l’arrêté du 29 mai 1997).
Arrêté du 29 mai 1997 relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux bâtiments de la catégorie dite « à risque normal » telle que définie par le décret n°91-461 du 14 mai 1991 relatif à la prévention du risque sismique
Cet arrêté ne concerne que les ouvrages à risque normal, qui sont répartis en quatre classes :
Classe 1 | bâtiments dans lesquels aucune activité humaine ne nécessite un séjour de longue durée (exemple : réserve de magasin, entrepôt, abri pour animaux) |
Classe 2 | habitations individuelles, établissements recevant du public des 4ème et 5ème catégories, bâtiments de moins de 28 mètres et accueillant au plus 300 personnes, parcs de stationnement |
Classe 3 | établissements recevant du public des 1ère, 2ème et 3ème catégories, bâtiments de plus de 28 mètres ou accueillant plus de 300 personnes, centres de production collective d’énergie, établissements sanitaires et sociaux non classés en 4 |
Classe 4 | bâtiments dont la protection est primordiale pour les besoins de la sécurité civile et de la défense nationale ainsi que pour le maintien de l’ordre ; bâtiments contribuant au maintien des communications ; bâtiments assurant le contrôle de la circulation aérienne des aérodromes ; établissements de santé dispensant des soins de courte durée ou concernant des affections graves pendant leur phase aiguë en médecine, chirurgie et obstétrique ; centres de distribution publique de l’énergie ; bâtiments de production ou de stockage d’eau potable ; centres météorologiques |
Règlementation technique relative aux bâtiments relevant du risque normal
Un arrêté du 20 octobre 2010 définit les règles applicables aux bâtiments relevant du risque normal. L'arrêté originel incluait des dispositions spécifiques pour gérer une période de transition jusqu'au 1er novembre 2012, assurant ainsi la continuité technique indispensable en la matière par rapport aux règles antérieures basées sur la norme française NF P06-013 (PS92). Ces dispositions spécifiques à la période de transition n'ont plus cours aujourd'hui, et elles ne gardent qu'un intérêt historique par rapport aux ouvrages dont la construction a débuté pendant cette période.
Les règles Eurocode 8 (NF EN 1998) sont applicables de plein droit, en utilisant les spectres sismiques définis par l'arrêté du 20 octobre 2010 pour chaque zone de sismicité du zonage national.
Des règles simplifiées peuvent être utilisées en substitut de la norme NF EN 1998, pour certaines catégories d'ouvrages.
Ce texte vient aussi modifier des prescriptions antérieures relatives à la prévention parasismique pour les ouvrages existants. Il introduit un objectif spécifique de non-aggravation du niveau de protection parasismique pour les ouvrages modifiés qui seraient soumis à des prescriptions parasismiques, si ils étaient nouveaux, et des règles d'amélioration de ce niveau de protection en cas de modifications substantielles de ces ouvrages existants. A la demande de la profession, l'AFPS a publié un guide technique sur ce sujet.
Les arrêtés concernant notamment les ponts et les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ont été publiés en janvier et octobre 2011.
Règlementation relative aux installations ICPE à risque spécial (ICPE-Seveso)
L’arrêté du 24 janvier 2011, qui modifie l’arrêté du 4 octobre 2010 relatif à la prévention des risques accidentels au sein des installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation, fixe les règles parasismiques applicables aux installations classées dites « à risque spécial ».
Les dispositions spécifiques du texte sont applicables :
- aux établissements Seveso, c’est-à-dire aux établissements relevant de l’arrêté du 10 mai 2000 modifié ;
- aux établissements nouveaux et existants (c’est-à-dire autorisés après ou avant le 01/01/2013, avec des objectifs moindres pour les établissements existants) ;
- au sein de ces établissements, aux équipements susceptibles de générer des effets létaux impactant des zones en dehors des limites du site avec une occupation humaine permanente.
- Toutes les zones de sismicité (à savoir 1 à 5) sont concernées selon le zonage annexé au décret du 22 octobre 2010.
A la demande de la profession concernée, l'AFPS a édité de nombreux guides techniques pour aider celle-ci à décliner les exigences techniques de ce texte, notamment pour ce qui concerne : l'intégration de l'initiateur 'séisme' dans les études de dangers, les techniques de réévaluation de la performance sismique des structures et équipements les plus courants dans ces installations (réservoirs, racks,...), la réalisation d'études probabilistes d'évaluation de l'aléa sismique spécifique à un site donné.
En savoir plus sur la réglementation sismique :
http://www.planseisme.fr/ICPE-a-risque-special,1476.html
Arrêté du 10 mai 1993 fixant les règles parasismiques applicables aux installations soumises à la législation sur les installations classées
Cet arrêté concernait les ouvrages à risque spécial. Il est rendu caduc par l'arrêté équivalent de 2011.
Ses principales prescriptions historiques étaient les suivantes :
Les ouvrages devaient être justifiés sous l’effet de « séismes majorés de sécurité » (SMS) définis à partir des « séismes maximaux historiquement vraisemblables » (SMHV) susceptibles de se produire à l’emplacement de l’ouvrage, selon les us et coutumes des approches déterministes de cette époque. La responsabilité de la définition de l'aléa sismique incombait à l'exploitant.
Néanmoins, pour les installations situées en zone de sismicité 0 ou Ia au sens du décret 91-461 du 14 mai 1991, l’arrêté du 10 mai 1993 fournissait en annexe un spectre de réponse forfaitaire correspondant au SMS, ce qui dispensait les exploitants concernés de disposer d'une étude d'aléa sismique spécifique au site.
La justification demandée par l’arrêté consistait d’une part à identifier tous les éléments de l’installation importants pour la sûreté (équipements principaux et accessoires, éléments de supportage…), et d’autre part, à vérifier la bonne tenue de ces éléments sous l’effet du séisme (SMS).
Une installation classée dont l’étude de dangers indiquait qu’elle ne présente pas de risque pour l’environnement est une installation à risque normal et elle rentrait de ce fait dans le cadre d'application de l’arrêté du 29 mai 1997 relatif au risque normal.
Arrêté du 26 octobre 2011 relatif à la classification et aux règles de construction parasismique applicables aux ponts de la classe dite « à risque normal » telle que définie par le Décret no 2010-1254 du 22 octobre 2010 relatif à la prévention du risque sismique
Cet arrêté vise les ponts nouveaux définitifs, incluant les passerelles, publics ou privés ainsi que les murs de soutènement qui en sont solidaires.
Les ponts sont répartis en quatre catégories d’importance :
Catégorie I | ponts qui n’appartiennent pas au domaine public et qui ne desservent pas d’établissement recevant du public |
Catégorie II | ponts qui n’appartiennent pas au domaine public mais qui desservent un établissement recevant du public, ou pont du domaine public non classé en catégorie III ou IV |
Catégorie IIII | ponts du domaine public qui portent, longent ou franchissent une voie terrestre importante : autoroute, voie express, voie à grande circulation, liaison ferroviaire à grande vitesse, ponts-canaux (hors classe à risque spécial), ponts situés dans les emprises des ports maritimes et fluviaux (hors ports de plaisance), ponts de pistes d’avion non classés en catégorie IV |
Catégorie IV | ponts de pistes d’avion, ponts dont l’utilisation est primordiale pour les besoins de la sécurité civile, de la défense nationale ainsi que pour le maintien de l’ordre public. Le classement en catégorie IV est prononcé par le préfet chaque fois que l’ouvrage constitue un point essentiel pour l’organisation des secours. |
Tout pont nouveau définitif de catégorie d’importance II ou III dont l’endommagement pourrait provoquer des dommages à un bâtiment, un équipement ou une installation de catégorie d’importance IV reçoit le classement de pont de catégorie d’importance IV.
L’arrêté impose pour la justification des ponts nouveaux définitifs de catégories d’importance II, III ou IV et situés dans les zones de sismicité 2, 3, 4 ou 5, l’application des normes NF EN 1998-2, NF EN 1998-1 et NF EN 1998-5, dites « règles Eurocode 8 », accompagnées des documents dits « annexes nationales » des normes NF EN 1998-2/NA, NF EN 1998-1/NA, NF EN 1998-5/NA s’y rapportant. Il fixe également les paramètres des spectres de réponses élastiques nécessaires à l’application de ces normes.
Il est en vigueur depuis le 1er janvier 2012.
Le Cerema a publié un guide d’application sur le sujet : « Ponts en zone sismique : Conception et dimensionnement selon l’Eurocode 8 » - 2015.
S’agissant de la problématique spécifique des ponts existants, actuellement non couverte par la réglementation nationale ni les normes Eurocode 8, le Cerema a également publié un guide sur le sujet : « Diagnostic et renforcement sismiques des ponts existants » - 2017
Les barrages font l'objet d'une réglementation spécifique qui définit les règles de classement en termes d'importance de ces ouvrages, l'aléa sismique à prendre en compte ou la façon de déterminer cet aléa sismique dans les cas spécifiques prévus dans la réglementation, et des règles techniques associées à la vérification de leur comportement parasismique.
Evolution réglementaire en Italie
Le 28 février 2017, le Ministère italien des infrastructures et transports a publié un décret important concernant la classification sismique des bâtiments :
http://www.mit.gov.it/comunicazione/news/linee-guida
Ce décret donne les moyens pour accéder aux avantages fiscaux, prévus par la dernière loi budgétaire, qui peuvent atteindre même 85% des coûts de travaux d’amélioration des performances sismiques d’un bâtiment (Sismabonus).
Il y a 8 classes qui vont de A+ pour les meilleurs bâtiments à G pour les pires bâtiments, en conformité avec les 8 classes de performance énergétique des bâtiments.
La classification dépend de 2 paramètres : « PAM » (perte moyenne annualisée d’endommagement sismique) et « IS-V » (indice de sauvegarde de la vie).
Le paramètre PAM est calculé comme l’intégrale de la courbe décrivant le rapport entre les coûts estimés d’endommagement et le coût de reconstruction du bâtiment en fonction de leur fréquence moyenne de dépassement (inverse du période de retour de l’action sismique correspondante). Les coûts d’endommagement doivent être calculé aux moins pour un état limite ultime et pour un état limite de service.
Le paramètre IS-V est le rapport entre l’accélération sismique au rocher qui provoque le dépassement de l’état limite de sauvegarde de la vie pour le bâtiment en question (capacité) et l’accélération sismique au rocher qui devrait provoquer le dépassement du même état limite selon le Normes Techniques pour le Constructions 2008 (demande associée à une période de retour de 475 ans).
Avec ces deux paramètres, la classification sismique est une mesure du risque sismique prenant en compte les états limites de service et les états limites ultimes.
Le décret prévoit aussi une procédure simplifié de calcul de la classe sismique pour les bâtiments en maçonnerie jusqu’à 2 étages et les bâtiments industriels préfabriqués.
Ce décret devrait contribuer à une meilleur maîtrise du risque sismique en Italie et devrait servir d’exemple pour d’autres pays.